Rupture conventionnelle collective (RCC) : guide complet

La rupture conventionnelle collective (RCC) est une disposition issue de l’ordonnance n°2017-1387 sur la réforme du code du travail du 22 septembre 2017, entrée en vigueur le 4 janvier 2018. Il s'agit d'une mesure collective qui vise à faciliter les ruptures des contrats de travail entre les employés et leurs employeurs. Bien qu’elle soit une transposition de la rupture conventionnelle individuelle de 2008, l’exécution de la rupture conventionnelle collective diffère à plusieurs égards. C’est sans doute la raison qui justifie la kyrielle d’interrogations de la part des employés, mais également des syndicats et des élus du CSE.

Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle collective ? Dans quelles conditions est-elle applicable ? Quels sont les avantages que peuvent en tirer les employés ? Les salariés séniors doivent-ils s’en inquiéter ? Quel rôle doit jouer le CSE dans le cas d'une rupture conventionnelle collective ?

Tour d'horizon de cette disposition spécifique du droit du travail.

RCC, Rupture Conventionnelle Collective

Qu'est-ce qu'une rupture conventionnelle collective ?

La RCC est un dispositif issu de la réforme du droit du travail et prévu à l’article L.1237-19 et suivants du code du travail, qui porte sur les suppressions d’emplois dans une société, même en absence de contraintes économiques. C'est une mesure qui entre dans la définition d'un plan de départ volontaire autonome. 

Il ne s'agit ni d'une démission, ni d'un licenciement, mais d'une rupture de contrat d’un commun accord entre l’employeur et l’employé. Seulement, sa mise en place est collective et, contrairement à la rupture conventionnelle individuelle, elle relève d'abord de l’initiative de l’employeur.

Pour être valable, la RCC est proposée par un employeur puis doit remplir certaines conditions définies par le Code du Travail.


Ensuite elle doit être soumise à l’approbation des délégués syndicaux, et selon le contenu de l'accord signé, être soumis également au vote des élus du CSE. 

C'est seulement après cela que le salarié pourra alors candidater, en fonction des conditions définies dans l'accord de rupture conventionnelle collective validé.

Au regard de l’engouement de certaines entreprises pour ce dispositif, certains élus et syndicats s’inquiètent des réels avantages sociaux pour les salariés. La RCC peut être une belle porte de sortie pour le salarié souhaitant changer de travail ou s’orienter vers d’autres projets. Et pour cause, une RCC offre certains avantages intéressants normalement inaccessibles en cas de démission volontaire.

Pour être valable toutefois une rupture conventionnelle collective doit donc remplir certains critères avant sa mise en œuvre.

Les conditions nécessaires à une RCC

Avant sa mise en œuvre, une RCC doit remplir des conditions bien définies. La première étape consiste, pour l’employeur, à prendre l’initiative d’enclencher le processus de la rupture conventionnelle collective. Il devra alors en informer les salariés, mais également l’administration compétente sans délai.


En ce qui concerne l’accord à réaliser et signer avec les représentants syndicaux de l'entreprise, certains détails sont impérativement à préciser, conformément à l’article L1237-19-1 du Code du Travail :

  • les modalités et conditions d’information du comité social et économique ;
  • le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d’emplois associées, de même que la durée de mise en œuvre de la RCC ;
  • les conditions à remplir par le salarié pour bénéficier du RCC (exemple : appartenance à groupe professionnel ou à un secteur d’activité précis, une occupation d’emploi ou de métier visée, projet d’entrepreneuriat, raison de mobilité, ancienneté, formations, etc.) ;
  • les modalités de présentation et d'examen des candidatures au départ des salariés, comprenant les conditions de transmission de l'accord écrit du salarié au dispositif prévu par l'accord collectif ;
  • les critères de départage entre les potentiels candidats (cette condition fait référence au cas où le nombre de postulants excède le nombre de départ envisagé ; un exemple de critère de départage peut être le nombre d’années d’ancienneté ou la priorité au candidat ayant des projets de création d’entreprise…) ;
  • les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié ;
  • des mesures visant à faciliter le reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents, entre autres des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion ou des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ;
  • les modalités de suivi de la mise en œuvre effective de l'accord portant rupture conventionnelle collective. Ainsi, les salariés sauront à qui s’adresser à chaque étape de l’exécution de la RCC.

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Adoption et mise en œuvre d'une rupture conventionnelle collective

Adoption d'un accord collectif majoritaire

L’adoption de la RCC précède indispensablement son exécution au sein d’une entreprise. La rupture conventionnelle collective doit faire l'objet d'un accord collectif conclu au niveau de l'entreprise ou de l'établissement qui va déterminer le contenu de la rupture conventionnelle collective et exclure tout licenciement. Le contenu de l'accord fixe également les objectifs de suppression d'emploi.

Pour être valable, cet accord est validé selon les modalités d'un accord collectif majoritaire, c’est-à-dire signé entre l'employeur et les organisations syndicales majoritaires au niveau de l'entreprise (ou de l'établissement si l'accord est signé à ce niveau).

Les organisations syndicales de salariés majoritaires sont celles ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique.

Les délégués syndicaux ont donc le pouvoir de rejeter l’accord s’ils estiment les conditions insuffisantes, comme ce fut d’ailleurs le cas au sein de l'entreprise Pimkie, que nous détaillons plus tard.

Une fois la convention de la rupture conventionnelle collective adoptée en entreprise, elle est transmise à l’autorité administrative, la DREETS (anciennement DIRECCTE), pour homologation conformément aux articles  L1237-19-3, 4 et 5 du Code du travail. Le modèle de demande, nommé CERFA, a été fourni par un arrêté du Ministre du Travail. Dès la réception du dossier, la DREETS dispose d’un délai de quinze jours pour l’homologation, à l’issue duquel elle est automatiquement considérée validée.

À compter du 2 décembre 2019, les dossiers de rupture conventionnelle collective sont à déposer sur le portail RUPCO, qui s’est substitue à l’ancien portail PSE-RCC.

Appel à candidature après homologation

Dès que la RCC est homologuée par la DREETS, l’employeur peut faire diffuser un communiqué interne faisant office d’appel à candidatures. Le salarié souhaitant en profiter peut alors adresser sa candidature à l’employeur pour enclencher le processus.

Le rôle des élus dans le cadre d'une rupture conventionnelle collective

Les organisations syndicales majoritaires puis les élus du CSE jouent un rôle majeur dans la validation d'un projet de rupture conventionnelle collective. 

Ce dispositif constitue un plan de départ volontaire et ne doit pas faire l'objet d'un plan de licenciement ensuite, si les objectifs de l'entreprise de suppression de poste ne sont pas atteints. Les élus doivent donc veiller à ce que la demande de l'employeur soit fondée par la volonté de réduction de certains effectifs propre à la philosophie de la rupture conventionnelle collective.

La rupture conventionnelle collective ne doit pas se substituer à un PSE (plan de sauvegarde de l'emploi) ou pire encore, à un plan de licenciement économique. 

Les élus du CSE, et les organisations syndicales majoritaires, doivent également veiller à ce que toutes les modalités d'accompagnement (indemnités, formations, délai de mise en œuvre) soient bénéfiques aux salariés qui candidateront.

Enfin les conditions nécessaires pour pouvoir candidater ne doivent pas être trop restrictives sur les catégories de salariés (comme les séniors avec une condition d'âge) pour ne pas empêcher certains salariés de bénéficier de l'opportunité que peut représenter une RCC. 

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 Exemple de sujets abordés pendant cette formation

  • Quels rôles pour les instances et les syndicats  ?
  • Comment doit se dérouler la procédure de licenciement économique ?
  • Quelles sont les mesures sociales d’accompagnement à mettre en oeuvre ?

Rédiger un accord de rupture conventionnelle collective

Pour rédiger un accord de rupture conventionnelle collective, vous pouvez vous aider de nombreux modèles disponibles en ligne.

Il ne faut en aucun cas s'appuyer sur des modèles de rupture conventionnelle individuelle. Le contenu d'un tel accord se rapproche beaucoup plus du modèle d'accord collectif.

L'accord de rupture conventionnelle collective doit contenir tous les éléments listés précédemment et constituant les conditions nécessaires d'une RCC. Il faut également veiller à inclure les informations suivantes  : 

  • les membres (employeur et organisations syndicales) participant à la négociation puis la signature de l'accord ;
  • la présentation du dispositif de rupture conventionnelle collective ;
  • la prise d'effet et la durée de l'accord ;
  • les modalités de consultation des élus du CSE pour le projet ;
  • les indemnités de départ prévues et les éventuelles mesures visant à faciliter le reclassement externe ;
  • le nombre maximal de départ et les suppressions d'emploi envisagées ;
  • la durée de mise en œuvre du dispositif ;
  • les modalités d'information du personnel à propos du dispositif ;
  • les conditions de candidatures (critères pour être candidat, modalités d'examen et départage des candidatures) ;
  • les modalités de suivi et de révision de l'accord ;
  • les possibilités de recours contre l'accord ;
  • le rappel de l'interdiction de licencier pour motif économique.

Pourquoi et comment candidater à une RCC ?

Une rupture conventionnelle collective adoptée au sein de votre entreprise vous accorde la possibilité de quitter votre poste sans être contraint de démissionner, et de vous lancer vers d’autres perspectives plus intéressantes.

Si vous souhaitez postuler, sachez qu’une candidature acceptée vous donne droit à certains avantages tels que des indemnités prévues par la RCC, qui ne doivent pas être inférieures à celles prévu en cas de licenciement économique.

Si la convention le prévoit, vous pourriez aussi bénéficier d’un accompagnement et de mesures de reclassement externe dans un emploi équivalent, des actions pouvant vous aider dans une reconversion ou en fonction de vos projets, d’un soutien de création d’activité et autres.

Si certaines conditions sont remplies, vous bénéficierez également de l’assurance chômage. C’est peut-être le moyen d’en profiter pour vous consacrer à une formation ou à un autre projet qui vous tient à cœur.

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Si après analyse vous trouvez judicieux de candidater, voici les étapes à suivre :

  • adressez une demande de candidature à votre employeur, dans l’attente d’une convocation pour un ou plusieurs entretiens ;
  • si vous remplissez les conditions, l’employeur vous fournira un exemplaire de l’accord de RCC, dont vous devrez  prendre connaissance afin de vous assurer des modalités (indemnités, mesures d'accompagnement, etc.) ;
  • une fois que vous avez l’exemplaire, vous avez 15 jours ouvrables de délai de rétraction ;
  • Après cette période, vous pourrez procéder à la signature de fin de contrat qui donne lieu aux indemnités convenues dans la RCC.

La rupture conventionnelle collective des salariés protégés

Les salariés protégés sont ceux qui bénéficient d'une protection spécifique vis-à-vis de la rupture de leur contrat de travail.


Il s'agit notamment des délégués syndicaux et des élus du CSE. Ils peuvent, s’ils en font la demande, bénéficier des dispositions de l’accord portant rupture conventionnelle collective. 


Dans ce cas, la rupture du contrat de travail dans ce cadre est soumise aux mêmes conditions qu'un licenciement : elle nécessite l’autorisation de l’inspecteur du travail.

Avantages et inconvénients d'une rupture conventionnelle collective

La rupture conventionnelle collective est un système proche du système de plan de départ volontaire, introduit par les ordonnances Macron pour assouplir les possibilités pour l'employeur de réduction des effectifs sans recourir à un plan de sauvegarde de l'emploi. 

La véritable contrainte du dispositif de RCC se situe dans l'impossibilité, si l'objectif de suppression d'emplois n'est pas atteint en raison de l'insuffisance du nombre de volontaires, de recourir ensuite à des départs contraints.

Points forts :

  • procédure simple (négociation, information du CSE, signature d'un accord collectif et homologation, puis candidature des salariés)
  • pas de mesures d'accompagnement poussées comme un PSE
  • délai de mise en œuvre plus rapide qu'un PSE

Faiblesses

  • ne concerne que les départs volontaires et oblige à conserver les emplois si l’objectif chiffré de départs volontaires n’est pas atteint
  • pas de mise en œuvre unilatérale avec l'obligation d’une signature par les organisations syndicales majoritaires

Exemples de rupture conventionnelle collective

La RCC a donc des avantages indéniables pour l’employeur. Non seulement, il est dispensé des pièces justificatives qui encadrent les licenciements économiques, mais il bénéficie également de plus de souplesse dans la gestion des départs, comparativement au PSE (Plan de Sauvegarde d’Emploi). 

Toutefois, c'est une procédure qui n'est pas adaptée pour la fermeture d'un site ou une nécessité impérative de réduction des effectifs, car elle ne pourra pas être suivi d'un plan de départs contraints. Certaines entreprises ont réussi à mettre en place une RCC quand d'autres n'y sont pas parvenues.

Une RCC réussie, celle du groupe PSA (Peugeot-Citroën-DS-Opel)

Pour comprendre le cas PSA, il suffit de lire la convention mise en place par le Groupe. C'est la première grosse entreprise ayant réussi à adopter une procédure de rupture conventionnelle collective RCC.

Le groupe PSA a proposé 1300 départs volontaires. À cela s'ajoutent les 900 congés séniors qui accompagnent ce programme, ce qui fait un total de 2200 départs volontaires, une réduction considérable de l’effectif de cette entreprise. Certes, le groupe prévoit de recruter 1400 employés de nouveau en CDI et pas moins de 2000 contrats d’alternance, mais cette main d’œuvre coûtera sans aucun doute moins cher que les anciens qui partiront.

Finalement, en plus du caractère moins contraignant de la RCC, le groupe PSA a bénéficié d’une forte réduction de sa masse salariale ; un avantage considérable. Toutefois, PSA n’est pas le seul à avoir eu recours à une RCC.

La Direction de l’enseigne de prêt à porter Pimkie a également voulu l’adopter, mais sans succès.

Une RCC avortée : l’expérience Pimkie

Le groupe Pimkie a en effet présenté un projet de RCC aux syndicats. Une suppression prévisionnelle de 208 postes via la convention qui, malheureusement, a été plus perçu comme un projet de licenciement collectif pour motif économique. L’accord n’a donc pas été signé par les syndicats qui ont rejeté le projet.

Formation CSE | Négociation & Dialogue Social

Nous vous aidons dans votre rôle d'élu du CSE. Exemple de sujets abordés :

  • Préparer et mener une négociation avec l’employeur
  • Contrôle Urssaf de l’entreprise : enjeux et règles à connaitre
  • Comprendre les règles d’assujettissement des prestations du cse
  • Mettre en place une politique sociale adéquate

Les inquiétudes concernant la RCC

Comme toute chose, la RCC n’a pas que du bon ; du moins cela dépend de vos aspirations professionnelles. Il convient d’analyser certains points avant de prendre la décision de candidater à une éventuelle RCC.

Lorsque vous optez pour une RCC, vous n’avez pas droit au CSP  (Contrat de sécurité professionnel) et donc pas droit aux avantages qui vont avec.

Vous serez dans l’obligation de vous inscrire au pôle emploi avec toutes les obligations qui vont avec. L’entreprise n’a aucune obligation pour ce qui est de votre reclassement ou reconversion.

Sachez aussi que la signature des syndicats n’est pas une assurance en soi, car certains employeurs mal intentionnés pourraient soudoyer les syndicats ou leur mettre la pression afin d’obtenir gain de cause.

La RCC, un handicap pour les séniors ?

Certains syndicats, principalement ceux de la CFDT (Confédération Française Démocratique du Travail) fustigent la RCC en raison de sa potentielle nuisance pour les salariés dits séniors.

Selon ces syndicats, des entreprises pourraient y recourir pour se "débarrasser" des salariés plus âgés, aux salaires plus élevés. 

Quoique cette crainte soit justifiée, la RCC est un départ volontaire. Seul le salarié pourrait décider de candidater pour la rupture de son contrat. Par ailleurs dans les conditions de candidature, l'âge ou l'ancienneté ne peuvent être un critère retenu dans l'accord de RCC, les salariés séniors ne peuvent donc pas être directement visé par des conditions restrictives de ce type. 

C’est d’ailleurs une bonne porte de sortie pour les séniors souhaitant se consacrer à d’autres projets personnels ou professionnels.

Le contentieux de la rupture conventionnelle : ce qu’il faut savoir !

Le contentieux consécutif à un accord de RCC peut concerner l’accord en lui-même (notamment la validité de sa procédure d’adoption) ou son exécution. Selon sur quoi porte le contentieux, c’est le tribunal administratif ou le conseil des prud’hommes qui sera compétent pour le régler. 

Dans le premier cas, le contentieux de la RCC peut porter sur l’accord, sur son contenu, sur la régularité de la procédure ayant précédé sa validation ou la validation par l’autorité administrative en elle-même. Sur ces sujets de contentieux, c’est le tribunal administratif qui est compétent.

Il peut être saisi dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision de validation par l’autorité administrative, pour l’employeur et de 2 mois à compter de la date à laquelle est reçue l’information de la décision de la validation, pour les salariés ou les syndicats. Le tribunal dispose d’un délai de 3 mois pour statuer. 

Lorsque le contentieux de la RCC porte sur l’exécution de l’accord collectif, alors c’est le conseil des prud’hommes qui est compétent. C’est le salarié qui souhaite contester une décision prise par l’employeur en application de l’accord de RCC qui doit saisir le CPH. Cela doit intervenir dans les 12 mois suivant la rupture effective du contrat de travail.

La RCC pourrait être avantageuse pour les uns et moins profitable pour d’autres. Cependant, elle reste un accord de départ volontaire pour le salarié. Les syndicats ont un pouvoir décisionnel sur la signature de l’accord ; l’entreprise peut donc revoir les points et améliorer le projet en cas de rejet. Pour vous aider, retrouvez des exemples de ruptures collectives et un dossier complet sur le site dédié à ce sujet du gouvernement.

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