De multiples occasions de consommer de l’alcool au travail peuvent se présenter. En effet, sont régulièrement organisés des pots de départ, de naissance, de mariage, de retraite, de promotion professionnelle, de fin d’année, etc. Parfois même, il arrive que des salariés consomment de l’alcool sur leur lieu de travail, sans raison particulière à fêter.
Cependant, il est parfois difficile de savoir ce qui est autorisé ou pas et de nombreuses questions se posent :
- Peut-on boire de l’alcool sur son lieu de travail ?
- L’employeur peut-il effectuer des tests d’alcoolémie sur le lieu de travail ?
- Quels sont les risques pour le salarié et l’employeur en cas de non-respect des règles concernant l’alcool au travail ?
Dans cet article, nous faisons le point sur la réglementation.
Est-il autorisé de boire de l’alcool sur son lieu de travail ?
L’article R.4228-20 du Code du travail précise qu’ « Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail. ».
Cependant, même si le Code du travail ne comporte pas de précision concernant la quantité d'alcool maximale qu’il est possible de consommer, l’article R.4228-21 du Code du travail interdit aux personnes d’être ivres sur leur lieu de travail.
Est-il possible pour l’employeur de limiter ou d’interdire la consommation d'alcool au travail ?
L’employeur peut tout à fait limiter ou interdire la consommation d’alcool sur le lieu de travail. Notamment dans le cas où, comme indiqué dans le 2e alinéa de l’article R.4228-20 du Code du travail, cette consommation peut nuire à la sécurité et à la santé physique et mentale des travailleurs.
En effet, l’employeur étant responsable de la santé et de la sécurité des travailleurs, il doit prendre les mesures permettant de prévenir les risques. Et pour cause, l’alcool est un facteur démultiplicateur des accidents du travail.
C’est d'ailleurs ce qu’a démontré une étude de l’INSERM en 2003 qui fait le lien entre l'alcool et les accidents professionnels dans 10 à 20 % des cas. Cette interdiction totale doit être prévue dans le règlement intérieur si l’entreprise doit en avoir un ou dans une note de service.
Ici, un exemple de notes de service concernant la consommation d’alcool, source : IRISst.
Quelles sanctions pour l’employeur qui ne prend pas en compte les risques liés à la consommation d’alcool au travail ?
Le non-respect de l’obligation de sécurité et de santé des salariés par l’employeur lui fait courir le risque de sanctions civiles et/ou pénales.
Selon l’article L.4741-1 du Code du travail, une amende de 10 000 € par salarié concerné, c'est-à-dire consommant une boisson non autorisée, peut être encourue, et en cas de récidive, l’employeur risque une peine d’un an d’emprisonnement et une amende de 30 000 euros.
Quelles sanctions en cas de consommation d’alcool sur le lieu de travail ?
Un salarié qui ne respecte pas la note de service ou le règlement intérieur interdisant la consommation d’alcool sur le lieu de travail peut être sanctionné disciplinairement.
Par exemple, un salarié ayant une fonction impliquant la conduite d’un véhicule et qui causerait un accident à un tiers peut être licencié pour faute grave.
Dans le cas d’un accident du travail lié à l’alcool, il est possible pour la CPAM de ne pas indemniser le salarié.
Les tests d’alcoolémie en entreprise : une possibilité pour l’employeur
Il est tout à fait possible pour l’employeur de demander un test d’alcoolémie à un salarié sous certaines conditions :
- Il faut que cette possibilité soit inscrite dans le règlement intérieur ou la note de service avec les conditions de sa mise en place.
- Il doit être réalisé en présence d’un tiers (potentiellement un membre du CSE).
- Il doit être justifié par la nature du travail du salarié. Par exemple, dans le cas où un état d’ivresse ferait courir un danger aux personnes ou aux biens.
Le contrôle d’alcoolémie sur le lieu de travail doit pouvoir être contesté par le salarié. En effet, il doit pouvoir demander qu’un nouveau test soit effectué (contre-expertise).
Comment mettre en place une « politique alcool au travail » ?
L'instauration d'une politique alcool au travail peut avoir plusieurs causes.
Ainsi, elle peut être encouragée à la suite d'accidents au sein de l'entreprise, mais également pour des raisons de sécurité des salariés ou encore si l'alcoolémie perturbe le travail d'un ou des salariés et enfin, parfois dans le cadre d'une campagne nationale.
L'objectif est de toujours protéger les salariés contre le danger que peut représenter la consommation d'alcool.
Si l'employeur, sur demande ou influence des élus, décide de mettre en place une politique «alcool» au sein de son entreprise, le ministère du Travail préconise la création de deux groupes :
- Un comité de pilotage.
- Un groupe de prévention alcool interne à l'entreprise.
Les membres de ces deux groupes doivent suivre une formation à l'alcoologie, qui est dispensée par des formateurs compétents, tels des assistants en santé au travail, ou encore une association nationale de prévention en alcoologie et addictologie.
Le groupe de prévention, sur décision du comité de pilotage, a pour objectif de faire :
- Un état des lieux.
- Organiser l'information et la communication sur la problématique de l'alcool en entreprise.
- Élaborer des protocoles et faire des propositions pour le règlement intérieur de l'entreprise.
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Pots d’entreprise et alcool : de nombreuses règles à connaître
En dehors des cas de consommation d’alcool pendant le temps de travail qui sont détaillés plus haut, il est courant que soient organisés des pots d’entreprise (repas de fin d’année, pots de départ, etc.) afin de créer des moments de convivialité entre personnes d’une même entreprise.
Dès lors, deux cas de figure existent :
- Le pot dans les locaux de l’entreprise.
- Le pot à l’extérieur des lieux de travail.
Le pot dans les locaux de l’entreprise
Comme vu précédemment, dans les locaux de l’entreprise ne peuvent être consommés que du vin, de la bière, du cidre et du poiré. Tous les autres alcools sont interdits.
Ainsi, pour rappel, une amende de 10 000 € par salarié concerné, c'est-à-dire consommant une boisson non autorisée, peut être encourue par l'employeur. Par exemple, en cas de non-respect de cette obligation lors d’un pot d’entreprise en présence de 50 personnes, il peut encourir une amende de 50 000 €.
De plus, il doit rester vigilant afin qu’aucun salarié ne soit en état d’ivresse.
Le pot à l’extérieur des lieux de travail
Le pot à l’extérieur de l’entreprise est régi par des règles différentes, car il ne dépend pas du règlement intérieur.
Cependant, le salarié étant invité par son employeur, il lui reste subordonné et donc soumis à son pouvoir de direction.
C’est pourquoi, en cas d’accident, sa responsabilité pourrait être engagée. Il est donc nécessaire qu’il applique des mesures de prévention.
Les mesures de prévention possibles en cas de pot d'entreprise avec présence d'alcool
Pour éviter les dérapages ou pire les accidents, l’employeur peut prévoir différentes mesures de prévention à mettre en place.
Il peut ainsi décider de :
- Rappeler par mail aux salariés les règles applicables pendant le pot d’entreprise ainsi que les risques liés à l’alcool.
- Prévoir le pot à distance de la reprise d’une activité dangereuse ou nécessitant la conduite d’un véhicule.
- Limiter les quantités de boissons alcoolisées.
- Fournir un grand choix de boissons non alcoolisées.
- Prévoir de quoi manger afin de limiter le pic d'alcoolémie.
- Fournir des éthylotests pour que les salariés puissent s'autotester.
- Proposer des aménagements pour le retour aux domiciles (taxi, navette, covoiturage, etc.)
- Etc.
Consommation d’alcool au travail des apprentis, stagiaires et travailleurs mineurs
Les apprentis, les stagiaires et travailleurs mineurs, en raison de leur vulnérabilité, sont protégés par la loi grâce à des dispositions spécifiques.
Ainsi, les apprentis devront avoir une consommation d’alcool « raisonnable » lors d’un pot d’entreprise. En effet, en cas de consommation excessive l’inspection du travail peut demander la suspension des contrats d’apprentissage dans l’entreprise. Il faudra donc leur porter une attention particulière.
Pour les mineurs, toute consommation d’alcool doit leur être interdite. En effet, dans le cas contraire, diverses sanctions sont prévues dans la réglementation (articles L.3353-3 du code de la santé publique et 227-19 du Code pénal) :
- Le fait de le faire boire jusqu'à l'ivresse est passible d’une amende de 7 500 € minimum.
- Le fait de le provoquer directement à la consommation excessive d'alcool est passible d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende.
- Le fait de le provoquer directement à la consommation habituelle d'alcool est passible d’une peine de deux ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende.
Responsabilité de l’employeur en cas d’accident pendant ou après un pot de travail
L’employeur peut voir sa responsabilité engagée pour faute inexcusable, dans le cas d’un accident dû à la consommation d’alcool pendant ou après un pot d’entreprise (Cour de cassation, chambre criminelle, 5 juin 2007, n°06-86.228) :
- Sur le plan civil, l’employeur peut être tenu pour responsable des dommages causés à un tiers par ses salariés.
- Sur le plan pénal, l’employeur peut être inquiété pour non-assistance à personne en danger ou homicide involontaire.
La consommation d’alcool au travail est strictement réglementée. Il est donc impératif que vous, élus, en connaissiez bien les règles afin de pouvoir renseigner les salariés.