Sur l’échelle des sanctions pour faute professionnelle, il convient de toujours opter pour une mesure proportionnelle à la faute commise.
Au bas de cette échelle, la première sanction en ordre de gravité est le blâme, ou avertissement.
Il s’agit d’une mise en garde ou d’un rappel à l’ordre des responsabilités et devoirs de l’employé.
Cette mise en garde peut être orale, et consignée au dossier, ou écrite.
Dans tous les cas, bien que relativement légère par rapport à une mise à pied ou un licenciement, le blâme n’en est pas moins important.
Il a des répercussions sur la carrière de l’employé, sur son équipe, sur son moral, sa motivation et sur la confiance donnée par son employeur.
Une sanction à ne pas prendre à la légère…
Quelle est la différence entre l’avertissement, la mise en garde et le blâme ?
Dans le droit du travail du secteur privé, il n’y a aucune différence entre blâme et avertissement, ou mise en garde.
Toutes ces sanctions, dès lors qu’elles sont officialisées par l’employeur, consistent à mettre en garde l’employé fautif qu’une réitération de ses actes ou de son attitude professionnelle aurait des répercussions plus graves.
En d’autres termes, le blâme consiste à éviter que la situation ne perdure ou ne se reproduise, ce qui aboutirait à un possible licenciement.
Dès lors qu’elle devient écrite, sous la forme d’une lettre d’observation, d’une lettre de mise en garde ou d’un avertissement écrit, la sanction devient, de fait, disciplinaire.
Dans le cas du blâme ou de l’avertissement, on parle aussi de section préventive, car elle a pour objectif de corriger un « mauvais pli » ou une faute légère sans intention de nuire à l’entreprise. Le contrat de travail n’est donc pas modifié, contrairement à la mise à pied par exemple.
Qu’est-ce qu’un rappel à l’ordre ?
La nuance entre un rappel à l’ordre et un blâme (ou avertissement) est assez ténue.
Si le blâme peut porter sur divers types de fautes, le rappel à l’ordre, lui, porte exclusivement sur une notion de comportement, de discipline, ou d’insubordination.
Le rappel à l’ordre consiste pour l’employeur à signifier par écrit (avec prudence) ou plus simplement à l’oral à l’employé que son attitude n’est pas acceptable et déroge au règlement intérieur, au bon fonctionnement ou à la hiérarchie dans l’entreprise.
Le rappel à l’ordre ne constitue pas une sanction disciplinaire, contrairement au blâme. Il rappelle au salarié ses obligations contractuelles, mais ne le sanctionne pas.
Pour cette raison, l’employeur qui opte pour un rappel à l’ordre par écrit doit faire acte d’une grande prudence pour que cet écrit ne soit pas requalifié de sanction par les Prud’hommes et ne tombe sous le coup, en cas de licenciement ultérieur du salarié ou de blâme ultérieur pour les mêmes motifs, de la règle du non bis in idem (l’interdiction légale de sanctionner deux fois les mêmes faits).
Il faudra par exemple que le rappel à l’ordre écrit précise les engagements moraux du salarié, sur quoi porte le rappel à l’ordre, et que ce courrier ne constitue pas une sanction, mais qu’une sanction disciplinaire ultérieure pourra être prononcée si ce comportement perdure.
Lois sur le blâme professionnel et textes de référence
Convention collective
Règlement intérieur de l’entreprise si elle compte plus de 50 salariés (loi PACTE n° 2019-486 du 22 mai 2019)
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Quel motif pour un avertissement ?
Le motif d’un blâme ou avertissement professionnel doit être proportionnel à la sanction. Ce ne sera pas une faute considérée comme faute lourde ou faute grave (violence, vol…).
Ce ne sera pas non plus un retard au travail dans le cas où celui-ci reste exceptionnel. L’exemple de blâme doit représenter un écart au code de conduite dans l’entreprise.
Le blâme doit cependant, comme toute autre forme de sanction, être prévu au règlement intérieur de l’entreprise ou dans la convention collective. Si le règlement intérieur de l’entreprise de plus de 50 salariés n’est pas accessible, l’employé ne pourra pas être sanctionné pour non-respect des clauses dudit règlement. Une sanction disciplinaire à son égard pourrait être cassée par le Tribunal des Prud’hommes !
Voici des exemples de motifs de blâme (liste non exhaustive) :
- Absences répétées et/ou injustifiées
- Comportement irrespectueux ou discriminatoire
- Insultes ou écarts de langage
- Négligences ou erreurs significatives dans l’accomplissement des tâches.
- Non-respect des clauses de confidentialité, de loyauté, de discrétion
- Non-respect des ordres hiérarchiques
- Non-respect des règles de discipline ou de sécurité
- Retards répétés et injustifiés ayant des conséquences sur le bon fonctionnement de l’entreprise
- Tâches personnelles effectuées sur le temps professionnel
Le saviez-vous ?
Un employé placé en arrêt maladie par son médecin qui vient travailler et met en danger ses collègues (sécurité et vigilance au travail, cas de contagion…) peut être sanctionné. Il faudra toutefois prouver que le salarié a connaissance de son état de santé, et de la mise en danger d’autrui…
Quelles sont les conséquences d’un blâme pour un salarié ?
Le blâme étant en soi une sanction disciplinaire, il ne peut être accompagné d’autres sanctions (la sanction pécuniaire est interdite et la mise à pied ou une autre forme d’absence forcée non rémunérée serait une infraction au Code du travail).
De même, un salarié ayant reçu un blâme ne peut pas être rétrogradé ni perdre de ses responsabilités ou fonctions (rétrogradation) pour la même raison.
L’avertissement de l’employeur à l’employé a pour objectif de le « remettre sur les rails » et de renouer une relation professionnelle sur de bonnes bases.
Toutefois, si l'attitude de l’employé ne change pas après le blâme, cela aura un impact direct sur l’évolution de sa carrière au sein de l’entreprise, sur la relation avec sa hiérarchie et éventuellement avec ses collègues directs.
Combien de blâmes avant le licenciement ?
Ce paragraphe est l’occasion d’une mise au point, à l’encontre des idées reçues :
- il n’est pas nécessaire de sanctionner avec un blâme avant de licencier un employé
- un 2e avertissement au travail n’entraîne pas obligatoirement un licenciement
- il n’y a pas de durée minimale entre deux blâmes
- en droit privé, un blâme n’a pas de durée de validité (3 ans dans la fonction publique) : un blâme ne s’efface pas dans le dossier d’un employé
En effet, la loi ne prévoit pas un nombre déterminé d’avertissements ni ne comptabilise les blâmes.
Toutefois en toute logique, un employé qui se verrait infliger une succession de blâmes, pour des fautes variées ou des événements contrevenants répétés, devrait logiquement se voir sanctionner de manière plus lourde, notamment par un licenciement.
Dans ce cas, les notifications de blâme et courriers d’avertissement serviront de preuve de manquement professionnel à récidive de la part du salarié.
Par ailleurs, l’employeur peut tout à fait licencier pour un fait isolé qui n’aurait été précédé d’aucun blâme. Selon la règle de la sanction proportionnée, une faute lourde peut mener à un licenciement direct.
Le blâme dans la fonction publique a-t-il une signification différente ?
Le blâme adressé à un fonctionnaire présente un caractère plus grave qu’un simple avertissement adressé à un salarié du droit privé.
La sanction disciplinaire du blâme dans la fonction publique (qui, pour le coup, distingue l’avertissement et le blâme) fait l’objet d’un arrêté. Cet arrêté de blâme est versé au bulletin ou dossier de l’agent (l’avertissement ne l’est pas).
L’effacement du blâme dans l’éducation nationale ou tout autre corps de fonctionnaires est automatique au bout de 3 ans à compter de la date de la sanction, si aucune autre sanction n’a été signalée durant ces années.
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Procédure de blâme d’un salarié
La procédure RH relative au blâme est celle d’une lettre d’avertissement de travail.
L’employeur dispose d’un délai de 2 mois, à partir du moment où il a pris connaissance de la faute, pour adresser le blâme à son salarié.
Le blâme ne nécessite pas la tenue d’un entretien préalable (sauf disposition contraire de la convention collective applicable), mais rien ne l’interdit non plus.
En pratique, un blâme est presque toujours précédé d’avertissements oraux du manager envers le salarié. La lettre d’avertissement salarié pour travail mal fait n’arrive que dans un second temps.
La lettre d’avertissement doit comporter une mention rappelant que des peines plus importantes peuvent être appliquées en cas de récidive.
La lettre est remise soit en recommandée avec accusé réception, ou par courrier remis en main propre contre décharge, plus de 2 jours et moins d’un mois après l’entretien.
Attention
Le règlement intérieur ou la convention collective peuvent prévoir une procédure disciplinaire spécifique, avec exceptionnellement la tenue d’un entretien préalable.
Peut-on envoyer une lettre de blâme par e-mail ?
Bien que ce cas de figure ne soit pas prévu par le Code du travail, la jurisprudence a considéré que des reproches écrits faits par e-mail constituaient une mise en garde pouvant être qualifiée d’avertissement.
Blâme abusif : quand un salarié peut-il contester un avertissement ?
Un avertissement de travail abusif donnerait à l’employé la possibilité de contester un blâme. La contestation d’un avertissement au travail peut arriver dans un certain nombre de cas (liste non exhaustive) :
- blâme à motif discriminatoire (origine, sexe, mœurs, identité sexuelle, âge, situation de famille, grossesse…) selon l’article L. 1132-1 du Code du travail
- blâme relatif à l’exercice normal du droit de grève ou incitation à la grève (voir notre article sur la Grève)
- blâme à l’encontre d’un salarié victime ou témoin de harcèlement sexuel ou moral
- blâme à l’encontre d’un salarié engagé dans une procédure de whistleblowing (ayant relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits de corruption dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, de faits relatifs à la sécurité sanitaire, de faits relatifs à un risque grave pour la santé publique ou l’environnement, de situations de conflits d’intérêts…) ;
- blâme faisant suite à l’exercice par le salarié de son droit de retrait face à un danger grave et imminent
- blâme ou avertissement de travail à délai prescrit (2 mois après les faits reprochés)
- blâme accompagné d’une sanction disciplinaire complémentaire
- blâme ne citant pas les faits reprochés
Un salarié peut tout à fait contester un avertissement à l’aide d’un modèle de lettre de réponse à avertissement travail, invoquant les fondements de sa réfutation ou à défaut sa non-responsabilité.
L’employé a également la possibilité de contester un blâme par l’intermédiaire du Conseil des Prud’hommes.
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Comment aider le salarié en cas d’avertissement ou de blâme ?
En termes de pédagogie, on visera toujours une évolution vers une amélioration de la situation et des suites plus positives, pour ne pas créer un sentiment de frustration ou de punition chez le salarié. L’objectif principal étant que les erreurs de comportement ne se reproduisent pas.
Un certain nombre de mesures peuvent être prises par l’encadrement de l’employé pour permettre que la situation ne se reproduise pas :
- coaching ou mentorat par un collègue plus expérimenté
- formation spécifique
- adaptation des horaires de travail pour motif impérieux
- audit du poste de travail et des missions
- entretiens avec un psychologue du travail
- évaluation et auto-évaluation
- etc.
Avis de non responsabilité : Cet article de blog est destiné à des fins d'information uniquement et ne constitue pas des conseils juridiques spécifiques. Les lecteurs doivent discuter de leur situation particulière avec un avocat ou professionnel du droit.